Prise de connaissance de l’étude

études notariale

Une fois la lettre de mission signée, en tant qu’expert-comptable, nous pouvons mettre en œuvre ses diligences de façon à exercer notre mission dans des conditions optimales. À cet effet, nous devons approfondir nos connaissances sur l’étude par la collecte d’un ensemble de données économiques, juridiques, comptables, fiscales et organisationnelles, nous permettant d’avoir une maitrise globale des problématiques susceptibles d’influer sur le déroulement de notre mission et sur l’orientation de nos conseils.

La première année de la mission, cette démarche constitue un investissement important, toutefois, elle est incontournable pour le respect des normes professionnelles dont l’objectif est d’assurer une qualité de prestation optimale. Cette préparation permet de bâtir le dossier permanent de la mission qui, par la suite, ne nécessitera plus que des mises à jour régulières.

Prise de connaissance approfondie de l’étude

Environnement économique de l’étude

L’environnement économique est composé de l’ensemble des éléments susceptibles d’influer sur le fonctionnement et l’évolution de l’étude. L’analyse à ce niveau ne peut se faire que par la prise en compte des contingences géographiques et sociales spécifiques au lieu d’exercice de l’office.

  • L’identification du secteur géographique. Le secteur géographique à prendre en compte correspond au bassin de population susceptible d’avoir recours aux services de l’office : l’arrondissement, la commune, le canton, etc.

Les caractéristiques urbaines ou rurales de cette zone, plus ou moins rémunératrices, auront une influence sur le type d’actes réalisés et sur le chiffre d’affaires de l’étude.

  • La clientèle potentielle. La connaissance du nombre de personnes vivant et travaillant dans le secteur permet d’évaluer le potentiel d’activité de l’étude. Il en va de même pour le nombre d’entreprises qui y sont implantées.

Ces données doivent être mises en parallèle avec le nombre d’actes réalisés de façon à mesurer le degré d’implantation de l’étude dans son tissu économique.

  • Les caractéristiques du marché. Il est important de considérer un certain nombre de caractéristiques propres aux ménages et aux entreprises en présence : catégories socioprofessionnelles des ménages, revenu moyen, secteurs d’activités représentés (commerce, artisanat, services, agriculture, industrie, immobilier), taille moyenne des entreprises, niveau du marché de l’immobilier etc.

L’ensemble de ces éléments donnent des indications sur le niveau du revenu et du patrimoine moyen de la population. Ceci revêt une importance pour l’expert-comptable dans la mesure où cela conditionne le type de prestations réalisées mais surtout la moyenne des montants traités sur chaque affaire et donc, le montant du chiffre d’affaires moyen par acte.

  • Dynamisme et perspectives économiques du secteur. Le contexte économique du secteur géographique dans lequel exerce l’étude impacte non seulement les résultats actuels de l’étude mais aussi leur évolution et ses résultats futurs. Il est donc instructif d’étudier quelles en sont les perspectives : expansion, stabilité ou déclin.

Cela permet de déduire et d’expliquer s’il existe ou non une cohérence entre les résultats de l’étude et ceux de la zone géographique dans laquelle elle exerce.

  • Voisinage professionnel. L’identification des confrères exerçant dans le même bassin de population permet de mesurer la pression concurrentielle à laquelle est soumise l’étude. Même si le numerus clausus et les règles de la profession ont pour but de limiter les effets de la concurrence, la réalité du terrain prouve que la forte notoriété, le savoir-faire ou la spécialisation d’une étude notariale dans un domaine particulier, peut-être un facteur de captation de clientèle. Les effets d’un tel phénomène sur les performances de l’étude, qu’elle le subisse ou qu’elle en bénéficie, ne doivent pas être négligés par l’expert-comptable.

Le statut social des notaires

Nous avons vu (dans la page consacrée) que les notaires avaient le choix entre plusieurs formes d’exercice. Leur statut social dépend étroitement de la forme choisie.

La connaissance précise du statut social des notaires détermine les caisses auxquels ils doivent être rattachés et le niveau des cotisations sociales correspondant à leur rémunération.

Pour effectuer une analyse précise de l’impact de ce statut sur les résultats de l’office, l’expert-comptable doit établir une synthèse reprenant le détail des rémunérations et des cotisations de chacun des dirigeants. Cette synthèse peut lui permettre d’effectuer un diagnostic destiné à optimiser ce statut.

Les locaux d’exploitation

La visite de l’étude est l’occasion pour l’expert-comptable d’évaluer, à plusieurs niveaux, les locaux dans lesquels les notaires exercent leur activité.

La première démarche consiste à apprécier le degré d’adaptation des locaux à l’exercice de la profession dans des conditions optimales d’accueil (convivialité et confidentialité) et de travail (fonctionnalité), ainsi qu’à l’évolution probable de l’office et de ses effectifs dans les années à venir. Ce diagnostic peut révéler la nécessité de procéder à des investissements à court terme voir à un déménagement ; des décisions susceptibles, au cours de la mission, de faire l’objet d’interrogations de la part des notaires sur leur impact financier voir patrimonial.

Il y a lieu ensuite de s’interroger si l’office est propriétaire ou locataire des locaux. S’il est locataire, il est nécessaire de se faire communiquer le bail afin d’en vérifier la pérennité et l’adéquation du loyer à la valeur locative réelle des locaux. En outre, il convient de s’interroger si le bailleur est lié à un ou plusieurs associés de l’office, souvent par le biais d’une S.C.I., de façon à appréhender les problématiques inhérentes à ce type de situation : risque de conflits d’intérêts entre associés par exemple.

La gestion sociale

L’analyse des différentes données de la gestion sociale de l’office renseigne sur la politique sociale des notaires et, corrélativement, sur les éléments constitutifs de la rémunération des salariés. Cet aspect est d’autant plus important que la masse salariale constitue le poste de charges principal de l’office.

La démarche de l’expert-comptable consiste à prendre connaissance des informations suivantes :

  • Nombre de salariés et moyenne d’âge.
  • Répartition des effectifs par catégorie sociale : elle permet d’apprécier la structure de l’office concernant le niveau de qualification du personnel.
  • Contrats de travail : l’expert-comptable se procure une copie de l’ensemble des contrats de travail.
  • Contrats particuliers : collecte et analyse des contrats de travail particuliers destinées à identifier les droits, obligations qui en découlent.
  • Bulletins de salaires et déclarations sociales : copie des derniers bulletins, contrôle d’un bulletin par catégorie de salarié et des dernières déclarations sociales.
  • Historique des contrôles U.R.S.S.A.F et C.R.P.C.E.N.
  • Convention collective : respect des dispositions de la convention (entretien annuel, points d’indice de formation etc.).
  • Méthode de calcul des congés payés et droits acquis à la date de reprise du dossier.
  • Droits acquis au titre du droit individuel de formation : vérification du calcul de la provision en vue de sa comptabilisation ou de sa mention dans l’annexe.
  • Provision pour indemnité de départ en retraite : vérification du calcul de la provision en vue de sa comptabilisation ou de sa mention dans l’annexe.
  • Existence d’un accord d’entreprise : copie et analyse des accords conclus.
  • Procédures mises en place pour l’élaboration de la paie : existe-t-il des fiches de suivi de temps, de suivi des congés payés, des congés A.R.T.T. et du compte épargne temps,
  • Ratios : établissement d’un tableau synthétique sur les ratios clés liés à la masse salariale et aux effectifs de l’étude :
  • Masse salariale/ chiffre d’affaires : il doit se situer entre 37 et 40%
  • Nombre d’actes/ nombre de clercs : la moyenne se situe aux alentours de 240 actes par clerc et par an.

Ces ratios sont susceptibles de révéler une inadéquation entre les salaires et les produits générés par l’office ou bien entre l’effectif et le volume d’actes traités.

Les données de gestion de l’office

  • Les capitaux propres. Une prise de connaissance de la composition et de la répartition du capital est nécessaire. Elle permet de vérifier si les répartitions de dividendes (cas des S.E.L.) sont régulières. Il y a lieu aussi de vérifier si le capital a entièrement été libéré (cas des S.E.L.) ; dans la négative, on s’assurera qu’aucune distribution de dividendes n’est intervenue.

L’établissement et l’examen d’un relevé des comptes de prélèvements de notaires (notaire en individuel ou associés de S.C.P.) sur les 3 derniers exercices permet d’apprécier la politique de prélèvement pratiquée: prélèvements maximums ou prélèvements limités destinés à conserver une capacité d’autofinancement.

L’historique des affectations de résultats sur 3 ans caractérise la politique en matière de distribution de dividendes (cas des S.E.L.). Il autorise aussi la vérification des règles de dotation à la réserve légale (cas des S.E.L.) et éventuellement aux réserves statutaires.

  • Le chiffre d’affaires. L’analyse du chiffre d’affaires permet d’apprécier la progression de l’étude sur les périodes passées et donne des indications précieuses sur la gestion de l’office sur une période significative. A cet effet l’expert-comptable ayant déjà pris soin de recueillir les comptes annuels et les états C.S.N. des 5 derniers exercices, dispose des documents nécessaires pour élaborer une feuille de synthèse et dégager les tendances les plus marquantes.

Dans un premier temps, celle -ci peut être établie à partir des données suivantes :

  • Chiffre d’affaires et pourcentage d’évolution 
  • Nombre d’actes et pourcentage d’évolution
  • Chiffre d’affaires moyen à l’acte (issu des données précédentes).

De plus, il est intéressant, sur les mêmes périodes, d’identifier la répartition du chiffre d’affaires par type d’activité et d’en déduire la part de chacune d’entre elles.

Enfin, le nombre d’actes réalisés est mis en relation avec le nombre de rejets et de refus, le nombre de comptes clients ouverts dans l’étude ainsi que le nombre de clients créditeurs et débiteurs de façon à observer leur évolution et leur corrélation. On constate ainsi si l’évolution de l’activité de l’étude a des répercussions sur la qualité de ses prestations et de son fonctionnement.

  • La formation du résultat. La collecte des données sectorielles est un préalable incontournable pour l’activité notariale comme pour toute autre activité. Ces informations sont accessibles essentiellement auprès des associations de gestion.

Les moyennes sectorielles fournies par les associations de gestion agréées permettent de comparer l’impact de chaque poste sur la formation du résultat de l’office par rapport aux coefficients moyens observés dans les études de même taille. Cette analyse doit être effectuée par l’expert-comptable au moment de la prise de connaissance de l’étude, mais aussi à chaque arrêté de comptabilité, de façon, éventuellement, à proposer les solutions correctives appropriées.

De plus, il pourra utiliser ces tableaux pour analyser l’évolution de chaque poste sur les 3 dernières années de façon à détecter et expliquer les variations les plus significatives.

  • L’évolution de la trésorerie. Constituée à partir des informations fournies par les tableaux de bord des 5 derniers exercices, le tableau de synthèse est destiné à identifier les évolutions des postes concourants à la formation de la trésorerie.

Le système d’information et l’organisation comptable

L’essentiel de l’activité notariale repose sur des échanges d’informations en interne et en externe. Le moindre dysfonctionnement dans le système d’information peut engendrer un blocage du processus de production, synonyme de perte de temps, avec des conséquences dommageables en termes de rentabilité et de satisfaction client.

La qualité du système d’information, la fonction comptable en est l’axe central, est donc une condition capitale de la bonne marche de l’office. C’est pourquoi l’expert-comptable doit prendre connaissance du processus d’échange des données au sein de l’étude. À cet effet, il doit se faire communiquer ou établir, avec l’aide du responsable comptable, un schéma des flux de documents et d’informations entre les différents services de l’étude.

  • L’organisation comptable

La prise de connaissance de l’organisation comptable se fait essentiellement au travers d’un entretien avec le comptable taxateur. Son objectif est de permettre à l’expert-comptable d’évaluer ses compétences techniques, l’intérêt qu’il accorde au fonctionnement de son service, ainsi qu’au respect des procédures comptables existantes. En outre, l’entretien étant généralement le premier contact entre les deux professionnels, il doit être considéré comme une opportunité pour établir une relation de confiance nécessaire au bon déroulement de la mission.

Les thèmes et les objectifs à atteindre lors de cet entretien sont les suivants :

  • La séparation des fonctions : vérification de la connaissance par l’ensemble des collaborateurs des règles fondamentales en – la matière ; recueil ou établissement d’une grille d’analyse des fonctions.
  • Les délégations de signatures : liste des personnes habilitée et des montants autorisés.
  • Les procédures comptables : prise de connaissance des procédures comptables. Les affectations de tâches au sein du service comptable : établissement d’un état recensant les fonctions de chaque collaborateur et identification des modalités de supervision par le responsable hiérarchique.
  • Le logiciel comptable utilisé : identification du logiciel et vérification de la version utilisée. Copie de l’attestation de conformité. S’assurer de l’existence d’un manuel utilisateur et d’un contrat de maintenance. Test sur le degré de maîtrise des personnels des fonctionnalités essentielles. Contrôle des procédures en matière de sauvegardes informatiques.
  • La documentation disponible : recensement de la documentation mise à disposition du personnel comptable, liste des documents complémentaires nécessaires.

Le degré d’autonomie des personnels comptables : évaluation de l’ensemble des collaborateurs sur l’adéquation entre les qualifications et le poste occupé, appréciation de l’implication de l’équipe.

Cette démarche est destinée à évaluer le degré de fiabilité de l’organisation et du service comptable. Cette évaluation permet à l’expert-comptable de déterminer le niveau de collaboration qu’il peut attendre des personnels et de valider, à ce niveau, l’appréciation des risques effectuée lors de la phase liminaire de prise de connaissance. L’entretien fait l’objet d’une note de synthèse consignée dans le dossier permanent.

Utilisation des travaux d’autres professionnels

Les normes de travail de la profession permettent à l’expert-comptable de s’appuyer sur les travaux réalisés par d’autres professionnels. Il s’agit généralement de rapports établis par des conseils ou experts sur différents sujets (informatique, contrôle interne, démarche qualité, etc) liés à des problématiques rencontrées par l’office. Les rapports d’inspections entrent dans ce cadre. La recherche, l’analyse et la consignation dans le dossier permanent des travaux susceptibles de servir les objectifs de la mission, constitue une démarche incontournable qui peut s’avérer utile à tout moment.

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